
Mon résumé : Japon, Seconde guerre mondiale. 15 adolescents d'une maison de correction sont évacués vers un petit village perdu dans la montagne. Alors qu'ils viennent d'arriver un de leurs camarades meurt dans d'atroces douleurs. Craignant une épidémie, les villageois s'enfuient, laissant les adolescents seuls, coupés du monde.
Mon avis : Ce n'est pas une lecture de tout repos. Il plane tout au long de la lecture une atmosphère de drame et de violence (violence qui reste beaucoup plus maîtrisée que ce que je ne pensais, ce n'est pas comme chez Ryû Murakami).
Dès le début, le style de l'auteur, très poétique mais aussi très cru, nous plonge dans cette histoire, à la suite de ces enfants, envoyés dans des maisons de correction pour proxénétisme ou bien parce que leurs parents ne veulent plus d'eux. On assiste à leur avancée, de villages en villages, où se répètent des scènes d'humiliations : on leur crache dessus, leur jette des produits à la figure. Ceux qui tentent de s'enfuir sont dénoncés et rattrapés par les villageois. Toute issue semble impossible.
Quant ils arrivent à leur destination finale, l'accueil semble tout d'abord un peu meilleur. un forgeron vient à leur rencontre et les aide à s'installer. Mais rapidement, les enfants vont découvrir qu'il a un tout autre visage. Leur éducateur s'en va chercher un autre groupe et laisse les enfants au bon vouloir des villageois. Ceux-ci vont leur demander d'enterrer les cadavres des animaux du village qui ont été malades. Le soir, les enfants sont tous enfermés à clef dans une grande salle. Quand l'un des jeunes garçons décèdent, les villageois abandonnent alors les enfants et pire que tout, ils coupent l'unique sortie qui correspond à une voie de chemin de fer qui traverse une vallée que l'on ne peut franchir qu'avec un wagonnet. Les enfants se retrouvent alors bloqués sans possibilités de sortir. J'avais très peur que cette partie se transforme en massacre, mais au contraire les enfants vont s'organiser et se montrer beaucoup plus humains que les villageois. J'ai trouvé que Oe réussissait à faire un portrait saisissant de ses jeunes à la fois plein de fougue et d'innocence, capable de faire face aux problèmes les plus sérieux, puis de s'intéresser aux sujets les plus futiles avec un intérêt certain pour toutes les parties de leurs corps. Le héros va aussi s'éveiller à l'amour avec une petite fille que les habitants ont laissé derrière eux, près de cadavre de sa mère morte. Les jeunes vont rencontrer un jeune coréen, dont la communauté était aussi mise à l'écart par les villageois qui va devenir leur ami et leur apprendre qu'il cache un déserteur. Mais, même au cours de cette période plus calme, on n'oublie jamais l'horreur de la situation des enfants qui vivent dans leur crasse, qui sont obligés de chasser pour manger, qui enterrent leurs morts et dont les adultes refusent de les aider la seule fois où l'un d'entre eux réussit à traverser au péril de sa vie.
Le retour des adultes marque le retour de la bêtise humaine. L'ignorance, la vie en quasi-autarcie deviennent le moteur d'une haine aveugle et de comportements odieux. On termine le livre avec une énorme boule dans la gorge. Malheureusement -ou peut-être heureusement d'ailleurs- on ne sait pas ce qui arrive au héros, mais je pense que c'est parce que l'auteur a voulu nous épargner. En général, je n'aime pas ce genre de livre, trop violent psychologiquement, mais l'auteur réussit vraiment à en faire sortir autant l'horreur que l'humanité.
En quelques mots : un livre coup de poing dont on ne peut ressortir indemne, même si la fin est un peu trop rapide et trop ouverte. Je poursuivrai ma découverte de l'oeuvre de l'auteur.