dimanche 24 janvier 2016

Lettre d'une inconnue de Stefan Zweig



J'ai décidé d'essayer de faire un billet sur tous les livres que je vais lire cette année. J'ai toujours tendance à laisser traîner mes avis, alors que pour la quasi totalité de mes lectures, j'ai pris des notes que je n'ai plus qu'à mettre en forme, mais je laisse passer le temps et au final je ne le fais pas. Donc je me lance le défi cette année d'essayer de laisser une trace plus ou moins longue pour chacune de mes lectures. 

Je commence donc par ma première lecture de l'année 2016. J'avais dit dans mon bilan que je voulais revenir vers les classiques que j'avais un peu laissé de côté en 2015. Stefan Zweig était sur ma liste, mais je n'avais pas encore choisi le titre que j'allais lire, vu que j'en ai plusieurs qui m'attendent dans ma PAL. Et puis le dvd de Lettre d'une inconnue de Max Ophuls s'est retrouvé en promo. Comme j'en avais entendu beaucoup de bien, je l'ai acheté et j'ai sorti le livre de ma PAL. 

Lettre d'une inconnue est une courte nouvelle de Zweig puisqu'elle fait seulement une cinquante de pages.
R. , un romancier viennois célèbre, reçoit une lettre le jour de son anniversaire. Il n'a aucune indication sur la personne qui l'a envoyée. Dès le début de sa lecture, il apprend que le fils de l'auteure de cette mystérieuse épître est mort et que s'il lit cette lettre, c'est qu'elle aussi est décédée. Il découvre alors qu'il a passé sa vie à côté de quelqu'un sans même s'en apercevoir. 

Cette lecture n’a pas été de tout repos. Cela a même été une véritable lutte car j’éprouvais un véritable sentiment de rejet envers le personnage féminin et en même temps, j’étais totalement fascinée par cette histoire. Tout de suite après ma lecture, j’ai écrit ce qui suit.

Cette nouvelle je ne voulais pas l’aimer parce que c’est l’histoire d’une gamine qui tombe amoureuse d’un rêve.
Cette nouvelle je ne voulais pas l’aimer parce que cette passion aveuglante me semble excessive.
Cette nouvelle je ne voulais pas l’aimer parce qu’elle oublie totalement de vivre en espérant des miettes d’attention.
Cette nouvelle je ne voulais pas l’aimer parce que c’est l’histoire d’une « stalker » qui tombe amoureuse d’une star.
Cette nouvelle je ne voulais pas l’aimer parce qu’elle aime le héros « comme une esclave, comme un chien ».
Cette nouvelle je ne voulais pas l’aimer parce que tout le monde a déjà aimé sans retour et l’on s’en remet.
Cette nouvelle je ne voulais pas l’aimer parce que c’est l’histoire d’une femme qui gâche sa vie.
Cette nouvelle je ne voulais pas l’aimer parce que l’héroïne trouve toutes les excuses du monde un homme qui n’en a aucune.
Cette nouvelle je ne voulais pas l’aimer mais cette histoire m’a bouleversée.
Cette nouvelle je ne voulais pas l’aimer mais la fin m’a serré le cœur.
Cette nouvelle je ne voulais pas l’aimer mais à la fin, c’est Zweig qui a gagné.

Au final, c’est donc un coup de cœur car il est quand même très rare de lire un livre qui vous laisse un tel sentiment de malaise et en même temps qui arrive à vous émouvoir. Je n’adhère pas aux sentiments de l’héroïne qui pour moi tiennent plus de la folie que de l’amour, mais j’ai aimé le côté jusqu’au-boutiste de l’ouvrage ; cette véritable descente aux enfers qui ne s’arrêtera qu’à sa mort (je rappelle qu’on le sait dès le début). Son personnage est fascinant car on peut d’ailleurs se demander si au final elle n’est pas cruelle et égoïste de n’avoir rien dit de son vivant.

Je reprocherais juste à mon édition (celle du livre de poche) d’avoir les pires notes de bas de page du monde (et pourtant j’aime ça) parce qu’elles sont très confuses. Par exemple, il est écrit que le directeur de l’Opéra rend visite au héros. 
Note de bas de page :
entre 1918 et 1924, c’est Richard Strauss, le grand compositeur qui, après la mort en 1929 de son librettiste d’élection, Hugo von Hofmannsthal, allait demander un livret à Zweig : La Femme silencieuse, d’après Ben Johnson, opéra qui fut créé à Dresde en 1936 (et en l’absence de Zweig, alors en exil à Londres). Curieuse péripétie musicalo-politique de la machine nazie…
Résultat, on ne comprend même pas qui est le directeur de l’opéra, les dates sont totalement anachroniques étant donné que la nouvelle a été publiée en 1922 et en plus, on assimile le narrateur de la nouvelle à Stefan Zweig, ce qui m’a beaucoup perturbée, surtout que cela est fait à plusieurs reprises.

Je relirai sans aucun doute ce texte un jour, surtout que je pense que nos réactions doivent évoluer selon le moment où on le lit. Par contre, je ne suis pas sûre de regarder tout de suite l’adaptation, parce qu’elle est forcément différente de la nouvelle et j’ai envie de rester encore un peu avec mes souvenirs du livre.

19 commentaires:

  1. Comme toi, je me sens à mille lieues de cette fameuse inconnue et pourtant, le talent de Zweig pour dépeindre l'amour proche de la folie (je l'ai retrouvé dans "Amok") m'a bouleversée et totalement happée. Il a su me fasciner et m'émouvoir. Ce titre-là reste sans doute mon plus gros coup de cœur de l'auteur !

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    1. Oui c'est incroyable de nous fasciner avec cette histoire qui ne nous ressemble tellement pas.
      J'avais aussi adoré 24 h de la vie d'une femme, je ne sais pas lequel des deux je préfère. Je n'ai pas encore lu Amok, mais je compte bien le faire, vu que tu y trouves des points communs.

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  2. J'ai eu ma période Sweig dont les personnages sont souvent proche de la folie mais je préfère au final ses bio même si elles sont souvent romancées ( disons qu'on voit tout de suite qu'il reste romancier avant d'être historien...). Je n'ai jamais relu ses nouvelles bien qu'elles m'aient plu à l'époque...

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    1. J'ai dû mal à accroché à ses biographies romancées que je trouve trop partisanes (je pense à celle de Marie Stuart) et vu que je ne suis pas vraiment d'accord avec ce qu'il dit, je n'ai ps réussi à le terminer.

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  3. Là je t'admire. Je ne suis jamais arrivé à tenir à jour mes billets.

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    1. C'est un voeu pieu comme on dit. C'est mon premier billet alors que j'ai déjà lu 3 livres, donc ce n'est encore pas gagné ) 100 % mais au moins je vais essayer !

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  4. C'est l'oeuvre de Zweig que je préfère : il n'a jamais réussi à aller aussi près de l'âme féminine et c'est merveilleusement écrit et décrit, comme tu le rédiges si justement.

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    1. Oui c'est vrai que c'est rare les auteurs hommes qui saisissent aussi bien les femmes. J'aime aussi les dernières lignes du héros parce qu'il ne pouvait pas en être autrement. C'est beau, c'est juste, c'est poignant.

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    2. c'est beau de chez beau : je suis sortie totalement bouleversée par ce texte (l'histoire et l'écriture) !

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  5. je l'ai vue su scène, un moment très fort!

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  6. Tu m'intrigues avec ce résumé et ton billet. Je le note.

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  7. Je suis tentée. Ma soeur n'est pas vraiment fan de Zweig donc je n'ai jamais osé lire un livre de l'auteur mais ton avis me tente beaucoup. 2016, sera peut-être l'année où je découvre Zweig.

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    1. Je pense qu'il faut que tu le découvres. Je comprends qu'on ne soit pas fan, mais il faut se faire son propre avis. Je te conseille plutôt ses nouvelles que ses biographies romancées.

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  8. " Lettre d'une inconnue " attend depuis quelques années dans ma PAL parce que je sais que cette lecture va être difficile (émotionnellement veux-je dire) pour moi... et ton billet vient de me confirmer qu'elle va être encore plus difficile que je ne le pensais :-D

    Je crois qu'il va encore devoir patienter un peu ^^

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    1. Oui c'est un ascenseur émotionnel ! Mais c'est tellement intéressant que ça vaut le coup de le lire.

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  9. Très belle chronique, et je trouve ton édition très jolie!

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    1. Elle est magnifique, c'est dans une coffret collector (celui que tu vois à droite) qui était épuisé et que j'ai eu la chance de trouver dans ma petite librairie locale :-)

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